Si Google supprime une enquête journalistique

Google a supprimé la chaîne d’un journal enregistré, YOU-ng, et désindexé une enquête journalistique, qui est désormais beaucoup plus difficile à atteindre. Le directeur en charge, Germano Milite, l’a dénoncé, et la raison en est un rapport fait à Google par le protagoniste de cette même enquête, Matteo Pittaluga. La nuit dernière, Google a rétabli la chaîne après le rapport fait par Repubblica, parlant d'”erreur”. Ce matin, pour un autre rapport similaire (d’un associé de Pittaluga), Google a cependant supprimé à nouveau la chaîne, bien qu’il ait mis l’enquête sur le moteur de recherche. Google va probablement remédier à cette erreur également, puisque tout s’est passé de la même manière. En janvier déjà, le géant de Mountain View avait reconnu une erreur similaire, pour la suspension de l’application Manifesto sur le Google Store.

Dans le cas de Young, Pittaluga a déposé une demande de retrait auprès de Google pour violation des droits d’auteur, selon le dossier. YOU-ng a fait de nombreuses enquêtes sur des profils comme celui de Pittaluga, qui vendent des cours et des conseils pour gagner de l’argent (facilement, disent-ils) avec le numérique. M. Milite a enquêté sur cette entreprise, qu’il qualifie de suspecte et de trompeuse pour les clients potentiels. “Sous le prétexte infondé de la violation des droits d’auteur, Pittaluga a fait censurer notre enquête”, dit-il.

Google confirme à la Repubblica : “Nous examinons périodiquement toutes les contre-notifications de violation des droits d’auteur afin d’identifier les signes d’un éventuel abus. Le canal YOU-ng a été fermé au cours de ce processus. Après un examen plus approfondi, nous avons constaté qu’il s’agissait d’une erreur et avons rapidement rétabli la chaîne. Nous nous excusons pour la gêne occasionnée.”

Dans le cas du Manifeste, en janvier, Google avait retiré l’application parce qu’il ne croyait pas que le Manifeste était un journal (il l’est depuis un demi-siècle) et dans l’attente d’informations du journal qui étaient pourtant présentes, comme l’exige la loi italienne (par exemple sur l’éditeur, les contributeurs).

Ces mêmes jours, Twitter avait suspendu le compte de Libero pendant 14 heures, pour “activité suspecte”, sans donner d’explication (selon Libero).

Il s’agit plutôt d’une question parlementaire récente du sénateur Gianluigi Paragone (Groupe mixte, ex-M5S) contre ce qu’il appelle la censure de la chaîne YouTube de Byoblu (journal de contre-information).

Motif : “YouTube ne tolère pas les contenus qui diffusent de la désinformation dans le domaine médical, en contradiction avec les informations fournies sur le COVID-19 par les autorités sanitaires locales ou l’Organisation mondiale de la santé (OMS).” Paragone a également fait appel à l’Agcom (en date du 25 février).

Le sujet est également brûlant aux États-Unis, surtout après qu’en octobre 2020, Twitter avait bloqué la diffusion d’une enquête du journal pro-conservateur New York Post sur le fils de Joe Biden (actuel président américain), avant de faire volte-face. Selon de nombreux juristes, la question est vaste et touche aux droits fondamentaux. “Il n’y a pas d’équilibre des pouvoirs s’il n’y a qu’un seul sujet, de surcroît privé, pour établir l’équilibre entre la liberté d’expression et les autres droits”, comme l’a déclaré l’avocat Guido Scorza (au Garant de la vie privée). Un meilleur équilibre est nécessaire, selon le Congrès américain, qui évalue depuis des mois de nouvelles propositions de réglementation ; et il est nécessaire pour la Commission européenne, qui a proposé la loi sur les services numériques pour des cas comme celui-ci.

“Si le paquet de lois sur les services numériques devient une loi, nous pourrons plus facilement déposer des plaintes contre les décisions des plateformes ; savoir pourquoi la plateforme les a prises et s’y opposer”, explique Rocco Panetta, avocat spécialiste de la vie privée. Une activité qui est aujourd’hui très compliquée et souvent coûteuse pour les utilisateurs. Une autre mesure destinée à redonner aux utilisateurs un plus grand contrôle sur les algorithmes (et sur les seigneurs de ceux-ci). “Aujourd’hui, les droits fondamentaux des citoyens européens ne sont pas suffisamment protégés en ligne. Par exemple, les plateformes peuvent décider de supprimer le contenu d’un utilisateur sans l’en informer ni lui offrir une possibilité de recours. Cela a de fortes implications pour la liberté d’expression des utilisateurs”, a écrit la Commission en présentant la loi.

Maxime Le Moine
Maxime Le Moine
Grand amateur et passionné de technologie, j'ai un faible pour les machines en tout genre. Je vous partage les nouveautés tech pour vous permettre de vous garder à jour dans l'évolution qui ne s'arrête jamais!

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